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Par Guilhem Barroyer, Sylvain Melchior
Plaisir de modéliser : quand l’EAM devient un jeu d’enfant!
Chez Boldo, nous avons toujours été fascinés par ces outils qui disparaissent derrière leur usage. Des outils comme Notion, Miro ou Airtable qui donnent l’impression de penser à notre place, ou plutôt avec nous. Ouvrir une page, créer une base, tracer une relation… tout semble couler de source.
Ce plaisir d’utilisation n’est pas anecdotique, c’est un moteur de performance.
Et c’est précisément ce que nous avons voulu comprendre (et reproduire) dans un domaine où l’expérience utilisateur est souvent négligée : l’architecture d’entreprise.
Le lien entre stress, cognition et expérience utilisateur
Les recherches en psychologie cognitive et en neurosciences du travail l’ont largement démontré : un environnement complexe ou stressant diminue la capacité de réflexion, d’analyse et de prise de décision.
Le lien entre cognition et performance
Dès 1908, la loi de Yerkes-Dodson posait les bases de cette relation : un certain niveau de stimulation améliore les performances, mais au-delà d’un seuil critique, la surcharge mentale provoque une chute brutale des capacités cognitives.
Trop de pression, trop d’étapes, trop de frictions, et le cerveau entre en mode “exécution”, incapable de recul critique.

Courbe de la Loi de Yerkes-Dodson
Des études plus récentes, comme celles d’Amy Arnsten (Yale, Nature Reviews Neuroscience, 2015), ont montré que le stress chronique désactive partiellement le cortex préfrontal, la zone responsable des fonctions exécutives : planification, attention, mémoire de travail, prise de décision.
Sous charge cognitive prolongée, notre cerveau bascule vers des réponses automatiques, au détriment de la réflexion stratégique. Autrement dit : plus une tâche est difficile à accomplir, plus elle consomme d’énergie mentale, et moins il en reste pour penser.
L’ergonomie comme levier cognitif
Cette dynamique est au cœur de la Cognitive Load Theory de John Sweller (1988), qui distingue trois types de charges :
- la charge intrinsèque, liée à la complexité du sujet ;
- la charge extrinsèque, due à la manière dont l’information est présentée ;
- et la charge pertinente, celle qui favorise réellement la compréhension.
Les bons outils minimisent la charge extrinsèque pour maximiser la charge pertinente. Les mauvais font l’inverse.
Chaque clic inutile, menu imbriqué ou tableau illisible ajoute un micro-facteur de stress cognitif. Une interface confuse ne fait pas qu’irriter : elle altère la capacité à raisonner.
C’est pourquoi l’ergonomie n’est pas un confort, mais une condition de clarté mentale.
- une interface fluide libère la concentration ;
- une navigation intuitive réduit la charge mentale ;
- une visualisation claire soutient la mémoire de travail et la compréhension des liens.
Ce qui pouvait sembler un simple choix esthétique est en réalité un levier cognitif. Et c’est précisément ce levier que l’on doit activer dans les outils d’architecture d’entreprise : non pas ajouter de la complexité, mais rendre la complexité intelligible.
Car ce lien entre cognition et design n’est pas qu’un sujet scientifique : il conditionne directement la manière dont les organisations perçoivent et pilotent leur SI.
Des EAMs pour l’architecture ou l’architecte?
Des outils historiques “data-centric”
Pendant longtemps, les plateformes d’architecture d’entreprise ont été conçues pour documenter avant de servir, modéliser avant de raconter. Elles se sont construites autour de la logique du référentiel: stocker, organiser, normaliser. Mais rarement accompagner.
Les grands noms du début des années 2000 (MEGA, ARIS, Sparx, etc) ont joué un rôle fondateur : ils ont structuré la discipline, introduit des cadres méthodologiques communs (TOGAF, BPMN, Zachman) et permis aux DSI de décrire pour la première fois l’entreprise comme un système cohérent.
Mais ces solutions, aussi puissantes soient-elles, ont été conçues dans une logique centrée sur l’outil, pas sur l’utilisateur. Leur richesse fonctionnelle se payait d’une complexité d’usage, d’une esthétique utilitaire, et d’une expérience réservée à une minorité d’experts capables d’en maîtriser les subtilités. On y produisait des modèles détaillés, mais rarement des représentations engageantes. Les métiers, les directions et les partenaires finissaient souvent par ne pas s’y retrouver.
Cette logique a enfermé l’architecture dans sa propre excellence technique : un langage précis, mais peu partagé ; un patrimoine riche, mais difficile à transmettre. En voulant tout représenter, on a oublié de se demander si quelqu’un avait encore envie de regarder.
L’arrivée des outils modernes : une première bascule vers l’expérience
La décennie suivante a vu émerger une nouvelle génération d’acteurs (LeanIX, Ardoq, ValueBlue,…) qui ont cherché à réconcilier rigueur et agilité. Ces plateformes ont marqué une vraie rupture : interfaces plus modernes, intégrations avec les équipes produit, workflows plus dynamiques, collaboration accrue. L’EAM sortait peu à peu du territoire de la documentation pour devenir un levier de pilotage.
Mais cette évolution n’a pas tout résolu. Ces outils ont conservé un positionnement essentiellement orienté vers les grandes organisations : déploiements longs, coûts élevés, modèles complexes. Et surtout, ils ont encore du mal à dépasser la logique de la data-centricity, soit l’idée que la valeur d’un EAM repose sur la quantité de données qu’il contient, plutôt que sur la clarté qu’il procure à ceux qui l’utilisent.
Les progrès en matière d’expérience sont réels, mais le chemin vers une véritable approche centrée utilisateur reste inachevé. Trop souvent, les plateformes restent performantes, sans être agréables. Exhaustives, sans être intuitives. Puissantes, mais encore fatigantes cognitivement.
De la performance technique à la performance d’usage
Aujourd’hui, un EAM ne peut plus se contenter d’être exact ; il doit être lisible, engageant, collaboratif. Autrement dit : il doit respecter la façon dont les humains pensent.
Le modèle “customer-centric” n’est pas une posture marketing, c’est une posture cognitive. Il repose sur l’idée que la simplicité, la fluidité et la beauté de l’expérience sont des leviers de compréhension collective. Plus un outil facilite la pensée, plus il libère la réflexion.
Cette approche suppose de revoir entièrement la conception du logiciel :
- réduire la charge mentale de la navigation pour que la concentration se porte sur le sens, pas sur l’interface ;
- donner à la visualisation un rôle actif, comme support de raisonnement et non simple décor ;
- privilégier la collaboration naturelle plutôt que la configuration technique.
C’est exactement ce que les grands outils de productivité comme Notion, Miro, Figma ou Airtable ont compris : l’utilisateur doit pouvoir créer à la vitesse de sa pensée, explorer sans effort, apprendre sans tutoriel. Ce qui semblait être une question d’esthétique est en réalité un principe d’ergonomie cognitive.
Chez Boldo, nous nous inscrivons dans ce sillon ouvert par les solutions les plus modernes, tout en cherchant à aller plus loin dans une direction que peu ont encore explorée : l’union entre la rigueur du référentiel et le plaisir de la modélisation.

(Photo générée par l'IA)
Conclusion
In fine, on observe plusieurs approches selon la maturité et la culture des organisations.
Les grandes entreprises, aux systèmes vastes et imbriqués, privilégient la profondeur de modélisation et la maîtrise technique.
Les structures plus agiles, elles, recherchent la lisibilité, la collaboration et des outils qui rendent l’architecture intelligible par tous.
Chez Boldo, nous croyons que la rigueur ne vaut que si elle donne envie. Un outil d’architecture ne doit pas seulement être puissant, il doit être agréable à utiliser.
Car c’est cette expérience, fluide et lisible, qui transforme la modélisation en réflexe, la documentation en compréhension, et la gouvernance en dynamique collective.
Nous construisons un EAM fluide, gouverné et désirable : un espace où penser, modéliser et partager se font avec la même aisance que créer dans Notion ou dessiner dans Miro.

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